La crise
espagnole n’est pas seulement une crise économique. Elle est bien liée á celle
du monde économique occidental et à un
schéma européen incomplet de l’euro. En Espagne, elle a touché le secteur
immobilier, le taux de chômage, la dette publique et le déficit public. Mais ce
qui a vraiment bouleverser la politique nationale, c’est qu’elle a prouvé les
limites de la constitution espagnole de 1978 harcelée par le nationalisme.
Bulle
immobilière et crash financier
Il est vrai que
la crise s’est déclenchée avec l’éclatement de la bulle immobilière. Cet
effondrement a touché le secteur financier et bancaire du pays. Très fortement
exposées au secteur de la construction, les caisses d’épargne n’ont pas pu
résister les premières secousses du tremblement de terre provoquées par les
mesures de redressement financier de l’Union européenne.
Le débat
politique espagnol
En plus, soit
disant qu’une crise est une opportunité de changement, l’Espagne devrait
profiter de tous ces problèmes pour redessiner le schéma politique du pays. En
effet, les deux grands partis politiques qui ont gouverné depuis 1978 sont très
fortement rejetés par la population. Elle a pris conscience de l’historique de
cette période. Lassés deux, les espagnols cherchent de nouveaux projets
politiques qui puissent les aider à sortir de la crise. Comme le poids de
l’histoire est très fort, la solution d’extrême droite n’est pas bien reçue.
Cependant, d’autres projets sont bien écoutés. Au début de la crise, ce fut le
parti « Union, progrès et démocratie » (UPyD), formé avec des anciens militants
du parti socialiste (PSOE) et divers personnalités du centre gauche
universitaire. Ils rejetaient les dégâts du gouvernement du Premier Ministre,
José Luis Rodriguez Zapatero. Aux dernières élections européennes, le nouveau
phénomène politique Pablo Iglesias et son parti Podemos ont fait un score
impressionnant qui prouve le pays est face à une opportunité pour changer de
route ou pour avancer mieux, autrement. Quand on parle de l’Espagne, je parle
d’un pays avec 504.000 kms2. L’indépendance de Catalogne est impensable pour le
projet de futur. Ce serait la fin d’une
identité qui n’aurait pas su respecter la différence entre territoires, langues
et mentalités.
Catalogne : Une
vraie région
La constitution
de 1978 a approuvé un nouveau modèle de pays. L’État centraliste s’est organisé
territorialement en communes, départements y en communautés autonomes. Toutes
ces structures territoriales ont droit á l’autonomie pour gérer leurs intérêts
(art. 137). Le tribunal constitutionnel a défini les limites de ces régions en
maintes fois. Elles font partie d’un
tout, l’Espagne, qui les respecte et qui garantit leurs existences. En effet,
ces territoires sont reconnus comme une forme de l’organisation territoriale de
l’État.
Par rapport à
d’autres communautés autonomes, la Catalogne se reconnait comme une communauté
humaine caractérisée para la conscience de son identité culturelle, une volonté
de bien faire les choses face á la laxité de Madrid, centre du gaspillage
économique de l’État. Gérée par Convergencia y Union, un parti charnière à
Madrid, la région de Catalogne maintient l’unité linguistique avec huit chaines
de télévision publique qui coutent 292 millions d’euros. Sans la nommer puisque
l’Europe se dit laïque, les dirigeants sont garants de l’unité religieuse
autour de l’église catholique apostolique romaine. La Vierge de Montserrat est
la patronne de Catalogne, vénérée par les autorités politiques et les
chrétiens. Elle est installée dans le Monastère de Santa Maria de Montserrat,
qui est localisé sur la montagne sacrée des Catalans. Dernièrement, elle fait
partie des étapes importantes du tourisme à Barcelone.
Distinction
entre État fédéral et État des autonomies
Pour enrayer le
débat séparatiste des catalans, certains partis politiques ont avancé la
solution fédéraliste. Ce serait la
grande opportunité de reconduire les confrontations politiques. Il est vrai que
le sentiment nationaliste est bien enraciné. Les catalans sentent qu’ils paient
les frais du mauvais fonctionnement de l’Espagne. Cependant cette explication
est trop simple. Le parti au gouvernement de la Communauté Autonome de
Catalogne, Convergence et Union (CiU) est le parti charnière du gouvernement de
l’État. Le parti populaire (PP) et le parti socialiste (PSOE) ont eu besoin des
députés de CIU au congrès de députés. La facture a été chère à payer pour l’Espagne
puisque les efforts de décentralisation ont toujours provoqué des tensions
énormes dans le reste de l’État. Du fait, cette magouille politique a provoqué
de grandes zones d’impunité et de corruption qui apparaissent dernièrement.
Différence juridique
La principale
différence entre la notion de communautés autonomes (à l'espagnole) et l'État
fédéré, réside dans le fait que les communautés autonomes espagnoles ne
disposent pas de l'indépendance judiciaire (Art. 149 de la Constitution alinéa
5 et art. 150). Par exemple, aux
États-Unis d’Amérique, les États disposent d'un ordre judiciaire chapeauté par
leur propre cour suprême. Il existe un Tribunal fédéral qui s’occupe de
certains faits contraires á la Constitution américaine.
Par contre,
l'Espagne possède une organisation judiciaire commune pour les communautés et
l'État central. Le pouvoir judiciaire est unique pour tout le pays. Les
tribunaux de justice sont compétents aussi bien pour les faits relevant d'une
loi autonome que pour les lois de l’État, tout comme le fixe le Titre VIII de
la Constitution.
Pour les
prérogatives, la distinction apparaît dans la distribution. Un État fédéral
répartie strictement l'ensemble des prérogatives entre les constituants. Un
État décentralisé les partage entre le centre et la périphérie.
L'Espagne n'est
donc pas une fédération. Les communautés ne sont autonomes que dans l'aspect
législatif et exécutif (Art. 148 premier alinéa). Il convient aussi de préciser
dans une communauté autonome, le chef de l’État, le roi, nomme le chef du
gouvernement régional, sur proposition du parlement monocaméral. La
transformation de l’Espagne en Fédération produirait plus de problèmes que ceux
qui pourraient se résoudre.
Conclusion
Pour en
conclure, l’expérience politique espagnole a produit un pays fortement
décentralisé. De nombreux problèmes se sont cachés sous les drapeaux «
historiques ». Certains politiciens en
ont profité pour voler des chiffres scandaleux. Seulement quelques-uns d'entre
eux ont fini en prison. Une fois dénoncés par l’opposition, les politiciens
soupçonnés de corruption sont partis tranquillement hors du pouvoir. La transformation de l’État décentralisé en
Fédération oblige une révision constitutionnelle. Ce serait une aubaine pour
l’impunité puisque le pouvoir judiciaire finirait dans la région. L’État
central ne pourrait plus surveiller les délits commis dans les régions. Les impôts
seraient toujours les mêmes, administrés par les mêmes serveurs publics. De
plus, la citoyenneté ne verrait pas une amélioration de sa qualité de vie avec
de meilleures écoles ou de nouveaux hôpitaux.