jeudi 27 janvier 2022

Arrêt Monpeurt du 31 juillet 1942 rendu par le Conseil d’État

Introduction sur l’histoire

Avant tout, il faut savoir que cette décision a été adoptée pendant le régime de Vichy. Cette ville, Vichy, était le siège du régime traditionaliste, xénophobe et antisémite français qui a assuré le gouvernement de la France du 10 juillet 1940 au 20 août 1944 durant l’occupation du pays par le Troisième  Reicht. C’est-à-dire que le système juridique était assez pauvre.

Donc, l’arrêt Monpeurt du 31 juillet 1942 rendu par le Conseil d’État confirme que les organismes créés par les pouvoirs publics pour administrer l’économie avec le concours des professionnels remplissent un rôle qui relève du contrôle de la juridiction administrative au même titre que les autorités administratives classiques.

L’arrêt Monpeurt a ainsi permis une évolution du droit administratif puisque désormais les organismes privés peuvent produire des actes administratifs. De ce fait, à partir de l’arrêt Monpeurt les organes administratifs ne sont plus les seuls à pouvoir prendre des actes administratifs.

Ce qu’il faut savoir, c’est qu’à travers la jurisprudence Monpeurt, le Conseil d’État va aussi permettre une évolution de la notion d’établissement public. À partir de cet arrêt, les établissements publics ne sont plus exclusivement des services publics dotés de la personnalité morale ou de personnes morales dotées de prérogatives de puissance publique.

En effet, ils sont désormais aussi des services publics personnalisés, ainsi que des personnes dotées de prérogatives de puissance publique, auxquels le Conseil d’État dénie expressément la qualité d’établissement public.

En d’autres termes, il s’agit d’établissements privés qui de par leur fonction ou leur but servent à la continuité du service public.

L’arrêt Monpeurt du 31 juillet 1942 marque alors une véritable évolution de la notion du service public, dans la Continuité de l’arrêt Blanco de 1878. A partir de cet arrêt, peu importe le statut de l’organe prenant l’acte, si sa mission contribue au service public les actes qu’il édictera seront soumis au Contrôle du Conseil d’État.

Quels sont les faits ?

Les faits de l’arrêt Monpeurt sont les suivants : La loi du 16 août 1940 créa les comités d’organisation, institution à caractère corporatif chargée de l’organisation de la production industrielle. Ces comités avaient différentes missions, dont celle de contribuer à limiter ou encore à atténuer les effets de la pénurie sévissant à l’époque.

C’est ainsi que, pour prévoir les conséquences d’une pénurie de charbon, le Comité d’organisation de l’industrie du verre s’efforça au début de 1941, de provoquer des ententes volontaires qui permettaient aux entreprises de répartir entre elles les possibilités de production au mieux de leurs intérêts respectifs.

Mais, craignant sans doute que cette politique ne soit insuffisante, il est allé plus loin encore et s’est engagé sur la voie des ententes obligatoires. Le 25 avril 1941, le directeur du Comité d’organisation prit une décision concernant le secteur particulier des tubes en verre neutre ou ordinaire dont la fabrication était assurée par trois entreprises. Il a rejeté aussi  une demande d’autorisation de mise à feu présenté par l’une d’elles et a imposé en compensation aux deux autres l’obligation de lui livrer vingt tonnes de tubes par mois avec un rabais de 20 % sur le tarif normal. En l’espèce, le Comité d’organisation des industries du verre et des commerces s’y rattachant prend une décision le 25 avril 1941. Celle-ci consiste à déterminer les entreprises autorisées à fabriquer des tubes en verre neutre ou ordinaire pour les ampoules en leur imposant de livrer un tonnage mensuel de verre à une usine à titre de compensation.

Le Secrétaire d’État à la production industrielle va confirmer cette décision le 10 juin 1941 parce qu’il va rejeter un recours formé par Monsieur Monpeurt contre la décision prise par le comité. De plus, la compensation demandée par le Comité sera exécutée par un taux de fabrication particulier au bénéfice d’une entreprise tierce, moyennant un « tarif normal affecté d’un rabais ».

Monsieur Monpeurt va solliciter le Conseil d’État le 2 juillet 1941 pour annuler la décision prise par le Secrétaire d’État par la voie du recours en excès de pouvoir tout en demandant un sursis à l’exécution de la décision attaquée.

Le requérant a sollicité le Conseil d’État pour l’annulation d’une décision du 10 juin 1941 par laquelle le Secrétaire d’État à la Production industrielle a rejeté un premier recours formé par celui-ci contre une décision du Comité d’organisation des industries du verre et des commerces s’y rattachant en date du 25 avril 1941.

Cette décision déterminait les entreprises autorisées à fabriquer des tubes en verre neutre ou ordinaire pour des ampoules et leur imposait de livrer à une usine, dont la demande de mise à feu du four n’avait pas été admise, un tonnage mensuel à titre de compensation.

La question de droit auquel devait répondre le Conseil d’État dans l’arrêt Monpeurt du 31 juillet 1942 était de savoir si une personne privée a oui ou non la possibilité d’émettre des actes administratifs ?

C’est-a-dire qu’il faut savoir si le Conseil d’État est-il compétent pour connaître des décisions prises par le Comité d’organisation des industries du verre et des commerces s’y rattachant ?

L’enjeu était grand puisque jusqu’à lors, seuls les organes administratifs avaient la possibilité de faire des actes administratifs. Autrement dit, seuls les organes administratifs étaient sous le contrôle du Conseil d’État.

Quelle est la solution de l’arrêt monpeurt rendue en date du 31 juillet  1942 ?

La solution prise par le Conseil d’État dans l’arrêt Monpeurt est très claire : les Comités ne sont pas des établissements publics mais ils participent à l’exécution d’un service public et par conséquent les décisions prises par de tels Comités sont des actes administratifs qui relèvent de sa compétence.

Quant à la légalité de la requête, le Conseil d’État va rejeter le recours formé par Monsieur Monpeurt. En effet, le Conseil d’État considère que la décision du 25 avril 1941 prise par le directeur du Comité d’organisation des industries du verre et des commerces entre dans le cadre des attributions qui ont été données aux comités d’organisation par l’article 2, surtout pour ce qui concerne les paragraphes 2 et 4, de la loi du 16 août 1940 sur  l'organisation provisoire de la production industrielle. (Dissolution des groupements professionnels; création de comites d'organisation).

Ainsi, selon le Conseil d’État il n’a pas « empiété sur les pouvoirs dévolus à l’Office central de répartition et aux sections dudit office par la loi du 10 septembre 1940, alors qu’il n’est même pas allégué qu’il ne se soit pas conformé aux règles édictées par ces organismes ».

Ce qu’il faut savoir, c’est que le Conseil d’État considère qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’oblige les comités à régler l’activité des entreprises lors de l’établissement des programmes de fabrication faisant référence à une période antérieure déterminée.

Ainsi, il leur appartient de tenir compte de l’ensemble des éléments de la situation du secteur industriel dont ils ont la charge, particulièrement pour ce qui concerne la capacité des entreprises demandant à continuer ou encore à reprendre leur production.

De fait, pour contester la légitimité de la compensation en nature prescrite au profit de cette société, le requérant n’était pas fondé à arguer de la situation des Établissements Boralex antérieure au 1er septembre 1935.

Par ailleurs, le requérant n’est pas non plus fondé à soutenir que la compensation dont bénéficie la société en vertu de cette décision constitue un enrichissement sans cause.

L’arrêt Monpeurt du 31 juillet 1942 à plusieurs apports. Ainsi, le premier apport de cet arrêt est de faire perdre définitivement à la notion de service public sa signification organique.


En effet, la gestion des services publics peut désormais être confiée, non plus seulement aux personnes publiques classiques, mais aussi à des organismes qui ne constituent pas « des services administratifs détachés de l’administration générale de l’État » (Conseil d’État, 16 mars 1956, arrêt Garnett) ou même à des personnes purement privées.


L’arrêt de principe Monpeurt, en second lieu, fait perdre à l’établissement public sa définition traditionnelle de service public doté de la personnalité morale ou de personne morale,  dotée de prérogatives de puissance publique. Depuis cet arrêt, il existe des services publics personnalisés, ainsi que des personnes dotées de prérogatives de puissance publique, auxquels le Conseil d’État attribue expressément la qualité d’établissements publics.


Ensuite, concernant les actes administratifs: Traditionnellement, la notion d’acte administratif s’entendait d’actes émanés de l’administration et, plus précisément, d’une personne publique. Désormais, un acte administratif peut émaner d’une personne privée.


Dans l’arrêt Monpeurt, la nature administrative des actes des comités d’organisation résulte de ce qu’ils sont pris « dans la sphère des attributions » des comités, « chargés de participer à l’exécution d’un service public ».

Le critère public est donc à lui seul déterminant pour reconnaître un acte administratif, que l’acte soit réglementaire ou individuel. L’arrêt Monpeurt confirme ainsi l’importance de la notion de service public en droit administratif, dans le prolongement de l’arrêt Thérond (4 mars 1910), l’arrêt Terrier (6 février 1903) et de l’arrêt Blanco (8 février 1873).
Pourtant, peu importe le rôle du critère du service public dans l’identification de l’acte administratif, il n’exclut pas celui de prérogatives de puissance publique de manière directe ou indirecte.


Tout d’abord, la présence de prérogatives de puissance publique permet de reconnaître un service public dans une activité générale confiée par les pouvoirs publics à un organisme.


Elle a été expressément relevée par M. Ségalat dans ses conclusions sur l’arrêt Monpeurt : Si un acte est administratif comme pris dans les sphères des attributions de services publics dont est chargé cet organisme, alors ces attributions comportent elles-mes des prérogatives de puissances publiques.
En second lieu, le critère de la puissance publique peut s’ajouter, voir se substituer à celui du service public pour reconnaître à un acte une nature administrative. Certains arrêts ne se contentent pas de considérer qu’une mesure est prise pour l’exécution d’un service public ; ils ajoutent qu’elle l’est en vertu des prérogatives de puissances publiques attribuées à l’organisme.


samedi 27 mars 2021

Les chiffres du "contentieux Covid"

Du 17 mars 2020 au 17 mars 2021, le Conseil d’Etat a jugé 930 requêtes en référé en lien avec le Covid-19, du 17 mars 2020 au 17 mars 2021.  Ce chiffre est considérable : il équivaut à peu près à 10 % de ce que reçoit chaque année le Conseil d’Etat dans l’ensemble de ses contentieux. Pour simplifier les calculs, tous les chiffres vont être expliqués sur les 930 étant le 100%

Un 30,43 % du total était des requêtes identiques portant sur l'adaptation des règles de l'assurance-chômage pendant la crise. C'est à dire qu'il y eu 283 requêtes sur le même sujet. 

Le reste regroupe 647 ordonnances de référé qui ont été rendues depuis un an. Que c'est-il passé avec le reste, soit 69,57 %.  Un 26,77 % du total a été rejeté sans que l’administration soit invitée à produire une défense parce qu’elles étaient irrecevables ou manifestement infondées (249).

Le 42,69 % (397) a été diligenté par una instruction. Dans 289 de ces 397 (31,08%), une audience a été organisée. Sur ces 397 requêtes, 89 ont été privées d’objet avant que le juge ne rende sa décision. Cela s’explique soit parce que le requérant a renoncé lui-même à poursuivre la procédure, soit parce que, dans la très grande majorité des cas, la personne publique a elle-même modifié la situation dans le sens souhaité par le requérant (il en a été ainsi, par exemple, pour le recours d’un parlementaire qui a obtenu, en cours de procédure, le rétablissement du droit d’être accompagné d’un journaliste et d’un collaborateur dans l’exercice de son droit de visite des établissements pénitentiaires) ou que le juge, dans une autre instance, avait déjà fait droit à la même demande. Dans certains cas, le dépôt d’une requête suffit en effet pour que l’administration, consciente de la fragilité de ses décisions, les rectifie de son propre chef sans attendre que le juge statue. Le 27% du total (255) des requêtes dans lesquelles l’administration a été invitée à défendre ont été rejetées. Quatre motifs correspondant aux conditions légales des procédures de référé-suspension et de référé liberté ont fondé, selon les cas, de tels rejets : le défaut d’urgence, l’absence de doute sérieux sur la légalité des dispositions contestées, l’absence d’atteinte grave ou manifestement illégale à une liberté fondamentale ou le fait que les mesures demandées par le requérant ne pouvaient être mises en œuvre dans un délai justifiant une décision en urgence.

Enfin, 51 des requêtes ont débouché sur une suspension paralysant l’application de la règle contestée et/ou une injonction, par laquelle le Conseil d’Etat a exigé une modification des pratiques de l’administration ou de la réglementation applicable. Beaucoup de ces décisions ont été relayées dans les médias, car elles concernaient la vie quotidienne des Français : ainsi le rétablissement du droit de manifester, de l’enregistrement des demandes d’asile en Ile-de-France, de la possibilité pour les justiciables de se rendre chez leurs avocats même après le couvre-feu ou du droit pour les Français de l’étranger de revenir en France sans devoir invoquer un motif impérieux. Ainsi, également, la réouverture des lieux de culte puis la suppression d’une jauge inadaptée, l’interdiction du survol des drones pour surveiller les rassemblements sur la voie publique, la reprise des sorties pour les résidents des EHPAD, l’interdiction de recourir à la visio-audience pour les procès criminels, l’obligation faite aux pouvoirs publics d’édicter des règles lisibles pour délimiter les quartiers dans lesquels le port du masque est obligatoire ou encore d’indiquer publiquement que le vélo est autorisé pendant le confinement pour mettre fin à l’arbitraire des contrôles. Je pourrais citer beaucoup d’autres exemples tout aussi concrets qui ont donné lieu, avec soin et pédagogie, à des brèves ou des communiqués de presse pour expliquer la portée pratique des décisions rendues.


dimanche 17 janvier 2021

Qu’est-ce qu’un grand commis de l’État ?

Qu’est-ce qu’un grand commis de l’État ? 

Le Comité d’histoire du Conseil d’État et de la juridiction administrative organise un colloque le vendredi 5 février 2021, afin de proposer différentes approches de la notion de « grand commis de l’État » et de son évolution dans le temps. 

Cette journée d’étude sera aussi l’occasion de rendre hommage à Marceau Long, vice-président du Conseil d’Etat de 1987 à 1995, qui réforma en profondeur la juridiction administrative.  

vendredi 20 novembre 2020

L' économie verte en Espagne

 

Métiers verts, éco-activités, activités périphériques... Le point sur l'économie verte, son actualité, son poids dans l'économie espagnole et ses moyens de financement. Nous en parlerons le prochain jeudi 26 novembre, à 20:30.





https://www.meetup.com/es-ES/Rencontre-de-langue-francaise-a-Madrid/events/274714609/

mercredi 28 octobre 2020

LES SYSTÈMES ÉLECTORAUX, par Miguel Ángel Arranz, 1º Maire adjoint Alcobendas

 

Le jeudi 5 novembre, nous parlerons avec Miguel Ángel Arranz, 1er Maire adjoint d'Alcobendas, à 20h30, en direct, en français.




L'impact du Covid complique la situation politique des démocraties occidentales. Dans d'autres régimes politiques, il affecte également mais ses habitants ne peuvent pas protester. L'Espagne vit son moment particulier avec une incidence particulière sur les communes, les entités les plus proches des citoyens.

Pour cela, Miguel Ángel Arranz, maire adjoint d'Alcobendas expliquera les réponses que les systèmes fédéraux permettent. En répondant à vos questions, nous pourront comparer l'Espagne et les États-Unis (USA).


Si vous le souhaitez, vous pouvez participer à la conversation en vous connectant, par Zoom, et en posant les questions que vous envisagez.

https://www.meetup.com/es-ES/Rencontre-de-langue-francaise-a-Madrid/events/274237322/

lundi 26 octobre 2020




Le jeudi, 29 oct. 2020, a 20 heures 30', nous parlerons des prochaines electiones americaines (USA qui auront lieu le 3 novembre. C'est donc un bon moment pour réviser le fonctionnement de nos démocraties occidentales. Nous auront une session para Zoom. Voci le lien



 https://www.meetup.com/es-ES/Rencontre-de-langue-francaise-a-Madrid/events/274166166/

mardi 21 avril 2020

Quel futur pour la France et le monde ?



Face au Coronavirus, nous sommes tous d’accord pour en finir avec lui. Il n’y a pas de doute. Soit nous luttons tous ensemble et nous gagnons, soit nous laissons la planète à ce virus et ces prochains frères  qui vont arriver dans ce siècle.
Vu qu’il n’est pas question de baisser les bras, normalement, nous devrions parvenir à gagner après une année de dégâts.
Comme toujours, il faudra savoir que va faire le Gouvernement après la victoire. Le premier pas est la recherche du créancier. Qui va payer la dette du pays ?
C’est pour cela que je propose d’écouter ce projet de relance. Sera-t-il possible de changer notre modèle économique ?