La vidéo
Cette
vidéo est un luxe pour les espagnols. En effet, le six juin 2010, les trois
tours de la cité des Indes à Sartrouville (Yvelines), comptant 251 logements,
ont été démolies par foudroyage. En quelques secondes, les trois tours de 13, 15
et 17 étages se sont effondrées dans un épais nuage de poussière et de gravats.
Le quartier des Indes compte 4.200 habitants, sur les 53.400 habitants de
Sartrouville, au nord-ouest de Paris. Appeler quartier, il a été construit et
connut, dans les années 1970, comme la Cité des Indes.
Années 60 et 70
Ce type
de construction fut une réponse au nombre de gens à loger en France au début
des années 70. Dans les villes, le logement inconfortable était encore très
répandu dans les centres anciens. C’est pour cela que furent construits les
logements sociaux qui deviennent très vite obsolètes. Résistants grâce au béton,
les grands ensembles avaient un cadre de vie très contesté, dû aux conditions
de logement.
Crise de 1975
Conséquence
de la crise du pétrole de 1975, la loi de 1977 inaugure le désinvestissement de
l’Etat du champ de la construction de logements. C’est le début de la ruine. Une
grande partie de la population qui a droit á un logement social, d’après son
niveau de revenus, n’arrive pas á y accéder par le biais d’attributions
sélectives et discriminatoires. Une autre partie résiste dans les tours. En effet,
la politique de rénovation urbaine a inauguré un cycle de démolition des
logements sociaux et de renouvellement urbain par la construction privée ou
soi-disant sociale. Ce n’est pas toujours du gout des habitants de la cité.
Pour eux, c’est leur espace communautaire, leur identité. C’est pourquoi ils se
sont parfois mobilisés dans le cadre de la «Coordination anti-démolition».
Le logement en Espagne
Pour la
plus grande partie des espagnols, le logement est un luxe. Le logement social n’existe
pas. Avec un énorme taux d’économie submergée, tous les systèmes publics de
distribution des logements sont faussés. Donc, tout le monde croit que l’autre
ne paye pas ses impôts. C’est vrai. Les grands tricheurs sont les grandes
entreprises qui ne payent pas l’impôt des sociétés. Les citoyens le savent mais
doivent payer un cher impôt sur le revenu. Comme ils ne peuvent lutter contre
ça, ils essaient d’en participer. Donc, les mairies ont organisés la
construction des logements sociaux axés sur la propriété. Le seuil public est
offert aux entreprises qui construisent des bâtiments « sociaux ».
« Gagner » un logement social
Le
logement social ne se loue pas. Il se vend. Le droit d’acheter un appartement
est gagné dans un « spectacle public ». Normalement, ça se fait dans
un pavillon sportif. Le public voit comment un notaire organise la loterie. Tout
le monde a un « billet ». Les mérites sont très élastiques pour que
quiconque puisse avoir le droit de participer. Le notaire garantie le système.
La situation
Donc, il
n’y a pas de politique publique d’intégration clairement lisible au cours des
années de politique de la ville. Il y a un déplacement sociologique évident. Les
personnes âgées restent dans le centre-ville parce qu’ils n’ont pas les moyens économiques
de partir. Les jeunes accèdent à la propriété des nouveaux bâtiments mal-appelés
sociaux. Les jeunes espagnols partent
vers les quartiers neufs et laissent les anciens logements aux étrangers. Le discours
sur l’intégration sociale reste un discours. Beaucoup de paroles, mais peu de projets.
La xénophobie s’est installée là où les mairies ont abandonné leur devoir de
gérer l’espace public.
Immigration
Avec la
crise économique, le problème d’intégration sociale a changé. Beaucoup d’immigrants
sont repartis dans leurs pays. De nombreux logements du centre-ville ont perdu
leur valeur. Pour l’instant, les nouveaux espagnols nés de parents immigrés
sont ceux qui ressentent le plus durement le racisme manifeste dans toutes ces
discriminations. Quelques-uns
d’entre eux le verbalisent et en font la base d’une action sociale et
politique. La plus grande partie se réfugie dans le groupe identitaire et national.
Le plus grand nombre méprise la revendication politique et s’adonne plutôt à
des formes de contestation artistique. Quelles que soient les formes adoptées,
elles sont généralement incomprises et négligées, voire caricaturées.
Conclusion
En France,
mettre en avant la crise des quartiers est une manière d’éviter de faire face à
la crise de société qu’elle révèle et de l’analyser autrement que par des
amalgames simplificateurs. En Espagne, le chômage a grimpé à plus de six
millions de personnes pour un pays de 45 millions. Surtout à cause de l’effondrement du l’immobilier.
Bien pire que la démolition des tours